La drogue







Le présent texte est partiellement remplacé par un nouveau : http://www.4p8.com/eric.brasseur/toxicomane.html


Le terme scientifique pour une drogue est "un psychotrope". L'effet d'un psychotrope est d'agir sur le fonctionnement du cerveau.

Le cerveau est capable de faire un grand nombre de choses : dormir, être excité, avoir du plaisir, avoir des angoisses, ressentir les choses que les cinq sens lui transmettent, avoir des souvenirs, penser à des choses, revoir des souvenirs, rêver, reconnaître des formes et des structures...

Le rôle d'un psychotrope est de déclencher ces choses artificiellement. Ou de les empêcher.


Le cerveau est capable de dormir. Et bien il existe une famille de psychotropes, que l'on appelle les somnifères, dont l'effet est de mettre le cerveau en état de sommeil. En général, on ne peut pas dormir "sur commande". Il faut attendre le soir... Mais si on prend un somnifère, une demi-heure après on est en train de dormir. L'effet du somnifère peut être tellement fort qu'on est impossible à réveiller. S'il est administré en piqûre intraveineuse ou en inhalation, le somnifère peut agir en quelques secondes.

Les anxiolytiques sont des psychotropes qui empêchent le mécanisme de l'angoisse dans le cerveau. Les psychiatres les prescrivent à des personnes qui ont de fortes angoisses.

Les antidouleurs sont des psychotropes qui empêchent le cerveau de ressentir de la douleur. Ils bloquent le mécanisme de la douleur. Les antidouleurs les plus utilisés, en vente libre, sont l'acide acétylsalicylique (aspirine) et le paracétamol (molécule proche de l'acide acétylsalicylique). Ils sont utilisés pour des maux de tête, des douleurs musculaires... Ils ont un effet curatif parce qu'ils ont également la propriété de favoriser la circulation du sang. (Attention : même s'ils sont en vente libre et donc supposés sans danger, une surconsommation de ces deux produits peut entraîner des lésions internes graves voir la mort.) Les opiacés sont toute une gamme d'antidouleurs : codéine (antidouleur léger en vente libre), morphine (antidouleur puissant couramment utilisé en milieu hospitalier) et héroïne (en principe interdit mais utilisé en milieu hospitalier pour les cas extrêmes). L'héroïne est l'antidouleur le plus performant. Non seulement elle efface les douleurs physiques les plus abominables (par exemple les douleurs causées par un cancer ou des brûlures graves, qu'aucun autre antidouleur n'arrive à calmer), elle efface également les douleurs mentales : remords, tracas, angoisses, culpabilité...

Les hallucinogènes sont des psychotropes très intéressants. Ils modifient ce que le cerveau voit, entend, sent, sa perception de la taille des choses, du temps... Par exemple : notre cerveau dispose d'un ensemble de neurones dont la fonction est de se rendre compte et de gérer le fait qu'un objet s'allonge. Si, en temps normal, on regarde un objet inanimé comme une brique, ces neurones ne seront pas stimulés. La conscience percevra que cette brique ne s'allonge pas. Par contre si on regarde un élastique sur lequel quelqu'un tire, ces neurones seront stimulés. Ils transmettront le message "L'objet est en train de s'allonger !" La conscience percevra donc que l'élastique est en train de s'allonger. Mais si on prend du LSD, ces neurones vont être mis en fonctionnement intempestivement. Ils fonctionneront, même si on est en train de regarder la brique. On aura donc l'impression que la brique est en train de s'allonger ! Tout le système de perception va être "détraqué", que ce soit pour la perception visuelle, auditive, le temps, le fait de se rendre compte qu'il y a des choses derrière ce que nous observons, la remontée de souvenirs... Un bon hallucinogène fait même voir et vivre des choses "sur base de rien", simplement parce que le cerveau est techniquement capable de se rendre compte que ces choses arrivent. On peut avoir l'impression de voler, de tomber, de nager... Si tous les centres de perception sont détraqués en même temps, on peut par exemple avoir l'impression de nager dans de l'air qui est en train de s'étirer. Il peut aussi y avoir une confusion entre les sens : on peut entendre des couleurs et voir des sons. Comme les hallucinogènes peuvent faire découvrir des choses à une personne, sur la façon dont son cerveau travaille et sur la façon dont elle peut percevoir le Monde, ils sont un outil initiatique intéressant. Beaucoup de tribus et de groupes les utilisent à cette fin. Ils font prendre une dose d'hallucinogène aux jeunes, lors des rites d'initiation. Certains artistes considèrent que l'expérience qu'ils ont vécue en prenant une fois un hallucinogène leur a appris beaucoup de choses. Ils peuvent permettre à des personnes qui ont un niveau spirituel encore faible de vivre certaines expériences avec plus de profondeur et d'intensité. Les hallucinogènes peuvent aussi être très dangereux : un automobiliste qui a l'impression que la voiture devant lui freine brusquement, une personne en haut d'une falaise qui a l'impression qu'elle peut voler, une personne terrorisée par les monstres qu'elle voit sortir du sol... tous risquent des accidents graves. Ils ne faut prendre un hallucinogène que sous la protection rapprochée de personnes fiables et initiées (même si on est fiable et initié soi-même) (les personnes qui ne suivent pas cette règle ne sont donc ni fiables ni initiées).

Un champignon de la famille des amanites contient un psychotrope qui met le cerveau en situation de combat. En cas de menace grave le cerveau peut se mettre dans un mode accéléré : les réflexes seront beaucoup plus rapides, la conscience se focalisera sur toutes les menaces qui entourent la personne. On voit le monde autour de soi bouger très lentement, on devient beaucoup plus rapide. Les soldats de métier connaissent bien cet état. Ils savent s'y préparer avant chaque bataille. Ce psychotrope extrait du champignon semble à priori très intéressant. Les gaulois l'ont utilisé. L'armée américaine a fait des recherches pour essayer de l'utiliser pour déclencher le mode de combat chez les soldats. Mais ils ont abandonné l'idée. Ils ont fait quelques essais, dont la conclusion a été la suivante : ce n'est pas une bonne idée d'en donner aux soldats inexpérimentés, parce qu'ils risquent de se mettre à faire n'importe quoi. Ils ne sont pas à la hauteur. Quant aux professionnels, ils n'en ont pas besoin. Ils trouvent même que ce produit les dérange, que cela diminue leurs performances.

La caféine, les amphétamines, la cocaïne... sont des psychotropes qui stimulent l'activité du cerveau. Ils rendent actif, font en sorte que l'on perçoit mieux ce qui se passe.

(L'héroïne et la cocaïne sont des psychotropes qui de prime abord ont une action opposée : l'héroïne calme alors que la cocaïne excite. Mais ils ont en commun une caractéristique essentielle : ils agissent sur les centres de l'approbation. Ils engendrent des sensations de plaisir et un sentiment de bien-être. Du fait de leur importance de cette caractéristique, un chapitre entier leur est consacré plus loin dans ce texte.)

Les neuroleptiques font tout simplement cesser l'activité du cerveau. Une personne qui a pris une forte dose de neuroleptique ne peut plus poser aucun acte, ne peut plus réfléchir, ne sait plus qui elle est.

La kétamine fait cesser l'activité des neurones qui amènent aux cerveau les informations de l'extérieur. On ne voit plus rien, on n'entend plus rien, on ne sent plus rien, mais on reste éveillé. Alors le cerveau se met à générer lui-même des images, des sons, des sensations. On peut "voir" n'importe quoi : des personnes qu'on a connues, des paysages, Dieu...


En général, l'effet d'un psychotrope finit toujours par cesser, ou diminuer. Cela peut prendre quelques minutes ou quelques heures. Il y a à cela plusieurs raisons, très différentes :
Certains produits mettent très longtemps à être éliminés. Leur effet peut durer des années ! En restant bloquées dans le cerveau, les molécules d'opiacés causent l'effet inverse de leur effet initial : le consommateur ressentira des douleurs physiques et morales. Un traitement médical peut permettre de forcer le cerveau à éliminer les molécules d'opiacé "bloquées" dans le cerveau.

Parfois l'effet ne cessera jamais, tout simplement parce que le produit a détruit des choses dans le cerveau. C'est par exemple le cas des molécules d'héroïne artificielle produite par des étudiants en chimie : les destructions qu'elles ont occasionnées dans le cerveau leur ont donné une maladie de parkinson dont ils ne pourront pas guérir.

Beaucoup de psychotropes déforment la personnalité si on les prend régulièrement pendant de longues périodes. Probablement surtout si les effets continuent pendant qu'on est en train de dormir. Le cerveau a sa perception du monde faussée par les effets du produit. Il va donc "s'adapter", se changer au fil du temps, dans un sens qui répond aux perceptions que lui donnent les effets du psychotropes. A cause de cela certaines personnes deviennent asociales, paranoïaques, prostrées... S'ils arrêtent de prendre du produit il leur faudra plusieurs années pour que le cerveau se "recâble" d'une façon plus naturelle. Un cas très intéressant est celui de beaucoup d'héroïnomanes. Ce sont des mythomanes achevés. Au fil du temps ils se persuadent de ce qu'ils veulent croire à un point extrême. Ils sont réellement convaincus de ce qu'ils vous disent. L'héroïne a permis une modification à la racine de leurs souvenirs. L'héroïne n'attaque pas directement les neurones qui gardent les souvenirs. Mais l'héroïnomane vit dans les rêves délirants que lui procure l'héroïne et son cerveau finit par enregistrer ces rêves comme étant la réalité. Le jugement des centres du souvenir est faussé par l'héroïne.

Un cas pernicieux est par exemple celui du LSD, qui peut se stocker dans les graisses de l'organisme. Un jour, sans qu'on s'y attende, les cellules de graisse libèrent le LSD qu'elles avaient stocké... C'est une loterie : cela peut arriver ou ne pas arriver. C'est pour cette raison que l'administration américaine part du principe qu'un homme qui a consommé plusieurs fois du LSD doit être considérée comme fou. A tout moment du LSD peut se libérer dans son organisme et lui faire faire n'importe quoi. Toute personne se destinant à une carrière importante doit éviter le LSD, parce qu'il est parfois possible de détecter la prise de LSD plusieurs années après. (Ceci est également vrai pour l'héroïne.)


Un détail technique, qui a son importance : des psychotropes qui ont les mêmes effets peuvent en réalité agir sur des parties totalement différentes du cerveau.

Certains antidouleurs vont bloquer les signaux de douleurs avant qu'ils n'atteignent le cerveau. D'autres ne vont pas bloquer la douleur, mais vont empêcher le cerveau de s'en rendre compte...

Les benzodiazépines sont des somnifères qui agissent d'une façon tout à fait différente des opiacés. Ils ont été largement adoptés parce qu'ils n'avaient pas les effets secondaires des opiacés.


La plupart des produits cumulent plusieurs effets psychotropes différents :

La morphine est un antidouleur, un anxiolytique, un somnifère et un stimulant des centres du plaisir.

Les THC, contenus dans le cannabis, sont hallucinogènes et anxiolytiques.

La cocaïne est un puissant insensibilisant et un vasoconstricteur quand elle touche une partie du corps. Mais elle est un stimulant, un anxiolytique et un stimulant des centres du bien-être quand elle touche le cerveau.

La raison pour laquelle un produit semble avoir plusieurs effets n'est pas toujours directement liée à ses effets directs sur le cerveau. Par exemple une personne qui a pris un peu d'alcool ou de morphine peut devenir très active. Ces deux produits ne sont pourtant pas des stimulants. L'explication est sans doute que cette personne a des blocages, elle est angoissée. Quand elle est libérée de ses blocages par le produit, désinhibée, elle se découvre la possibilité de faire des tas de choses. Elle est libérée de ses contraintes


Certains psychotropes ont des effets secondaires comme le manque. Après l'effet du produit, le cerveau va ressentir l'effet contraire. C'est le contrecoup. Par exemple, un peu après que l'effet de certains anxiolytiques se soit estompé, la personne va ressentir de fortes angoisses. C'est pour cette raison que l'on donne instruction aux personnes qui prennent ces produits de les prendre en continu et d'arrêter graduellement. L'héroïne procure un plaisir et un bien-être intense. Quand l'effet cesse, l'héroïnomane ressent de très fortes douleurs et vit des angoisses abominables. Cet enfer peut être tellement horrible que certains en meurent. Pour éviter de vivre cela l'héroïnomane est obligé d'en reprendre dès que les effets de la prise précédente commencent à s'estomper. S'il ne prend pas de nouvelle dose, il lui faudra plusieurs jours pour revenir à un état normal. Pendant tout ce temps il souffrira énormément. C'est ce qu'on appelle "le manque physique". Beaucoup de toxicomanes endurcis ne ressentent plus aucun plaisir quand ils prennent de la drogue, ils la consomment uniquement pour éviter le manque, pour ne pas crever de douleur et d'angoisse.

(Le manque physique de l'héroïne apparaît dès la première dose et s'estompe en quelques jours. Avec l'alcool, c'est exactement l'inverse : il faut plusieurs mois de consommation d'alcool pour que le manque physique apparaisse, mais alors on le garde à vie.)

Le café et la cocaïne stimulent l'activité du cerveau. Ils le poussent à fond, lui font utiliser toutes ses réserves de molécules neurotransmetteurs. Après un certain temps, ou quand l'effet du produit cesse, le cerveau ne dispose plus de neurotransmetteurs. Alors l'activité cérébrale de la personne s'effondre, comme si elle avait pris un neuroleptique. Beaucoup d'étudiants en ont fait les frais : ils boivent un paquet de café sur la nuit afin de finir d'étudier un gros examen. Ils connaissent bien leur matière. Mais ils arrivent devant le professeur au moment où l'effet du café cesse. Ils sont comme hébétés, ne savent pas quoi répondre aux questions du professeur. Ce n'est que quelques heures plus tard, quand le cerveau a reconstitué ses réserves de neurotransmetteur et reprend son activité normale, que l'étudiant se met à pouvoir répondre de façon limpide et précise aux questions qui lui avaient été posées... mais c'est trop tard. Ce phénomène explique aussi pourquoi les consommateurs de cocaïne passent pour être de grands paranos : quand l'effet s'estompe, le bien-être fait place à son contraire : des angoisses, des peurs, un sentiment d'insécurité, un délire de persécution. En même temps, le cerveau est dans un état de non-fonctionnement, incapable de mettre une idée devant l'autre, de se raisonner. La réaction normale d'un humain quand il se sent menacé et qu'il n'arrive pas à gérer la situation, c'est la colère. Il se fâche, il explose, il attaque.


L'accoutumance est le fait que le cerveau devient moins sensible au produit. Il s'habitue. Il faut lui administrer des doses plus fortes pour obtenir le même effet. Il y a à cela plusieurs raisons possibles :

Les conséquences de la prise inconsidérée de psychotropes sont nombreuses et très variées :

La dopamine

Pour appréhender le mécanisme des drogues dures il est essentiel de comprendre le mécanisme de la dopamine. C'est une des nombreuses molécules produites et utilisées par le cerveau.

Dans la vie normale d'un animal, la dopamine est sécrétée lorsqu'il fait quelque chose de "bien".

A quoi cela sert-il ? Prenons un exemple : l'animal mange une plante qu'il n'a encore jamais rencontrée.

Cette plante est riche en vitamines. Il serait donc bon que l'animal mange d'avantage de cette plante.

Le cerveau, sensible aux effets bénéfiques de la richesse en vitamines, va faire se déclencher une petite production de dopamine. Cette production de dopamine se caractérise par une sensation de plaisir. Elle aura pour effet technique que l'animal va enregistrer dans sa mémoire que cette plante est une bonne chose.

A l'avenir, la seule vue ou l'odeur de cette plante déclenchera déjà une petite production de dopamine dans le cerveau. Cela pousse l'animal à en manger.

Le réflexe de production de dopamine s'entretient et se renforce à chaque fois que l'animal mange et remange de cette plante.

Quand l'animal manque de vitamines, son cerveau fera en sorte que le souvenir de la plante lui vienne à l'esprit, avec une forte envie d'en manger.

L'endroit où se trouve la plante, le contexte, est très important. Si l'animal passe par hasard à cet endroit, son cerveau se rendra compte que c'est le périmètre où pousse la plante. Il libérera automatiquement une petite dose de dopamine, associée au souvenir de la plante. L'animal se mettra aussitôt à la recherche de la plante. C'est logique : comme elle est dans les parages, autant en profiter...

Si la plante est vraiment bonne, mais difficile à trouver, la production de dopamine peut devenir très forte : pour encourager l'animal à fournir les efforts nécessaire pour trouver cette plante.

La dopamine est "la molécule de l'approbation". Quand il y a production de dopamine, c'est comme si le cerveau mettait un cachet "Testé et Approuvé".

L'héroïne, la cocaïne, l'alcool, la nicotine et le cannabis ont la particularité de causer de façon directe la production de dopamine. La prise de ces produits engendre donc des sensations de plaisir, de bien-être ou d'assurance.

Ces produits court-circuitent tout le mécanisme d'apprentissage et de gestion de la vie. Plus besoin de faire des choses qui sont bonnes pour ressentir du plaisir : il suffit d'absorber un de ces produits. Ils "attaquent" les centres du plaisir et déclenchent directement la production de dopamine. Le cerveau recevra des doses de dopamines, sans qu'il n'y ait aucune bonne raison à cela.

Comme ils touchent au mécanisme de l'apprentissage ils engendrent le phénomène de l'accro psychologique. La personne "apprend" qu'il faut à tout prix qu'elle prenne de ce produit. Pour bien comprendre le phénomène de l'accro psychologique voici une longue analogie :

Supposons que votre corps est une entreprise. A la tête de cette entreprise, il y a le service de direction : votre cerveau. La personne à la tête du service de direction, c'est le directeur. Le directeur n'est pas très malin. Il se prend très au sérieux. Il donne des ordres que les employés suivent à la lettre. Mais il ne comprend pas très bien comment fonctionne l'entreprise. Pour prendre ses décisions, le directeur se base sur une seule chose : les bénéfices. Toute la journée le comptable lui envoie des notes avec l'état des bénéfices. Le directeur regarde attentivement ces chiffres et essaye de les coréler avec ce qui s'est passé pendant la journée. Supposons par exemple qu'un jour il y ait eu beaucoup de bénéfices. Le directeur est très content. Il se demande "Mmmmm, à quoi pourrait bien être dû le fait que nous avons fait tant de bénéfices aujourd'hui ? Oui oui : l'élément inhabituel, c'est que nous avons engagé l'intérimaire Jean Dupont. Aha ! Il y cinq jours nous avions aussi fait de très bons bénéfices, et justement ce jour là aussi Jean Dupont est venu travailler chez nous. Et bien c'est clair : dorénavant je ferai venir Jean Dupont le plus souvent possible." Le directeur passe son temps à essayer de deviner ce qui a fait augmenter ou baisser le chiffre d'affaire et il agit en fonction. Si à chaque visite de l'intérimaire Alfred Ducroc le chiffre d'affaire baisse, le directeur donnera l'ordre d'essayer de l'éviter. Si le directeur remarque que si on fait venir l'intérimaire Jean Dupont sans arrêt cela fait baisser le chiffre, alors il donnera l'ordre de ne tout de même pas le faire venir trop souvent (c'est le phénomène de l'écoeurement). Un jour arrive un intérimaire très spécial : l'intérimaire héroïne. Il ne fait rien du tout pour l'entreprise, il ne fournit aucun travail. Mais il fait une chose bien précise : lorsque le comptable envoie la note des bénéfices au directeur, il l'intercepte et il la transforme : il augmente le chiffre des bénéfices. Il ajoute carrément un zéro ! Quand le directeur reçoit cette note, il est transporté de joie. Il comprend tout de suite que cet intérimaire est quelqu'un d'excessivement précieux. Mais comme l'intérimaire héroïne n'a en réalité fait aucun travail, les bénéfices de l'entreprise ne sont pas très bons. Donc la note suivante du comptable sera mauvaise. Alors le directeur, très inquiet, donne l'ordre qu'il faut absolument trouver l'intérimaire héroïne et lui demander de travailler. Aussitôt qu'il vient, bingo, le directeur reçoit une note du comptable avec un chiffre mirobolant ! Le directeur ne peut bientôt plus se passer de l'intérimaire héroïne. Sans lui, le chiffre des bénéfices s'écroule... Pire : le comptable, sans le faire exprès, va essayer de compenser les notes mirobolantes. Il va envoyer des notes au directeur avec des chiffres négatifs. Des chiffres aussi énormes que les chiffres de l'intérimaire héroïne, mais en négatif. L'horreur ! Cela plonge le directeur dans le plus profond désespoir. Il est envahi d'une immense douleur, il se torture à essayer de comprendre s'il a fait de mauvais choix. Il donne l'ordre à tout le personnel de l'entreprise de cesser toute activité et de se consacrer à la recherche de l'intérimaire héroïne. Lui seul peut sauver la situation ! La simple annonce du fait qu'on l'a trouvé et qu'il est en train de s'installer à son poste de travail remplira le directeur d'excitation. L'intérimaire héroïne est très vicieux : au bout de quelques temps il ne se fatigue même plus à remplir des chiffres mirobolants sur les notes de bénéfice. Il se contente de gommer les gros chiffres négatifs que le comptable met et de mettre un zéro ou de petits chiffres positifs à la place.

En quelques mois l'entreprise fera faillite.

Qu'est-ce qu'il faut faire pour éviter que pareille chose n'arrive ?

La première solution qui vient à l'esprit est bien sûr d'éviter que l'intérimaire héroïne ne puisse entrer dans l'entreprise. Mais ce n'est pas toujours réalisable. De plus, cela peut engendrer un phénomène pernicieux : si le directeur a déjà eu recours aux "services" de l'intérimaire héroïne, il est prêt à beaucoup d'efforts pour l'engager à nouveau. S'il est difficile à trouver, le directeur deviendra très inquiet. Lorsqu'enfin on l'aura trouvé et qu'il aura fait parvenir une note de bénéfice bien grassouillette, Le directeur se sentira tout particulièrement heureux, très soulagé. Plus l'intérimaire héroïne est difficile à trouver, plus le directeur aura besoin de lui et mettra toutes les ressources de l'entreprise à profit pour partir à sa recherche. Rendre l'intérimaire héroïne difficile à obtenir est une mauvaise stratégie.

Certains diront qu'il faut punir le directeur quand il recourt à l'intérimaire héroïne : le critiquer ou le mettre en prison. C'est également une très mauvaise méthode : elle augmente d'autant le besoin du directeur de recourir à ses services.

La bonne solution est sans doute plutôt de mieux éduquer le directeur, faire en sorte qu'il soit plus intelligent et plus sûr de lui :
L'accro est un mécanisme pervers :
L'accro causé par le mécanisme de la dopamine dure très longtemps. On l'appelle "le manque psychologique". Il faut plusieurs années pour qu'il s'estompe.

Ce qui compte pour sortir d'une toxicomanie, c'est le fait d'avoir de la culture, "de la religion", savoir qui on est. Beaucoup de toxicomanes qui n'avaient jamais arrêté, malgré de nombreuses cures de désintoxication, arrêtent tout d'un coup à l'âge de trente ou quarante ans, brutalement, sans aucune aide. Pourquoi ? Parce qu'ils sont devenus plus matures, plus sages plus adultes. Tout d'un coup, la consommation du produit leur semble être quelque chose d'idiot. Il faudrait toujours attendre d'être arrivé à cet âge là avant de toucher aux drogues dures...

Il est important pour un toxicomane de comprendre ce qui se passe dans son cerveau. Il faut qu'il comprenne pourquoi il est accro, par quel mécanisme il est poussé à consommer. Mais cela ne suffit pas en soi pour qu'il arrête. Notre volonté émane du subconscient. Elle nous dépasse. Quand le "directeur" ordonne qu'il faut aller chercher de la drogue, nous lui obéissons même si nous savons qu'il a tort. Il est un petit roquet complexé qui crie très très fort en silence. Parfois nous croyions le dominer, alors il nous manipule par la bande : il nous susurre des justifications, il tronque notre perception de la réalité. Il nous dit "Juste une dernière fois !" ou "C'est des vitamines...". Il le dit même au directeurs d'autres personnes, pour se justifier. Pour réussir à éduquer le "directeur", il faut du temps et du travail. Il faut méditer, se reposer, communiquer, comprendre, se comprendre, accepter...

Pour sortir de la toxicomanie, les religieux proposent la prière : s'adresser à Dieu. Cette approche est tout à fait fondée : Dieu est le symbole du savoir et de la volonté. Il est la représentation idéalisée, complète et "parfaite", de ce petit "directeur" qui se démène à l'intérieur de notre cerveau.

Faut-il aider un toxicomane ? Si on peut le faire, bien sûr. Mais à mon sens il ne faut pas se croire obligé. Si on n'a pas les compétences et les ressources nécessaires, il vaut mieux s'abstenir. Il est parfois très dur de vivre au contact d'un toxicomane. On peut y perdre beaucoup, inutilement. L'espoir de guérison est souvent très faible. Il n'y a aucune honte à prendre ses distances, c'est souvent même une obligation. L'important, c'est de ne pas le démolir. Un toxicomane a une personnalité fragilisée. Il ne pourra sortir de sa toxicomanie qu'en ayant retrouvé une certaine personnalité. Pour cela, il a besoin du soutient des autres, au moins moral.

Pendant la Première Guerre Mondiale, des soldats se sont jetés sur des obus explosifs qui tombaient dans leur tranchée, pour protéger leurs camarades. Notre volonté peut commander notre mort. C'est cette même volonté qui commande le sacrifice ultime qui commande une toxicomanie. Sauver ses camarades, c'est bien, prendre de la drogue, c'est mal. Mais en souvenir du premier, j'évite de trop ouvrir ma grande gueule quand je suis en présence du deuxième.

La volonté est essentielle pour sortir d'une toxicomanie, mais elle n'est pas suffisante. Voire elle peut jouer contre la victime. Une forte volonté peut devenir une forte volonté de prendre de la drogue. Une personne qui arrête abruptement et qui souffre le martyr peut développer une peur panique du manque qui au final la rend plus dépendante encore. C'est un peu comme les régimes d'amaigrissement draconiens : au final on prend du poids. Pour réussir, il faut aussi de l'amour : du coeur, de la sensibilité, de l'intelligence, de la compréhension et de l'altruisme...


Un toxicomane a une perception complètement déstructurée du monde. Il ne sait pas, ou ne sait plus, ce que sont les choses, ce qui sert à quoi. Il ne sait pas comment il doit faire les choses qu'il a à faire.

La déstructuration est encore beaucoup plus grave au niveau de sa perception de lui-même. Il n'a plus d'identité. Il ne sait plus qui il est ni ce qu'il sait faire, ni quels sont ses liens avec les autres. C'est la raison de sa souffrance.

On tombe dans la toxicomanie parce qu'on a un problème d'identité. L'effet du produit, la production de dopamine, donne au toxicomane l'impression qu'il sait qui il est. Elle lui en donne la certitude absolue. Ensuite, parce que cette certitude était fausse, c'était un mensonge, la toxicomanie aggrave le problème d'identité. C'est un cercle vicieux très puissant. En voici quelques indices :
La preuve que les drogués ont une mauvaise approche de leur problème d'identité est qu'ils doivent sans cesse recommencer à prendre de la drogue. Ils ne progressent pas, ils n'apprennent rien.

Chez les gens civilisés, on donne une identité aux enfants en les aimant, en leur disant et en leur montrant qu'on tient à eux, en les comprenant, en les prenant dans ses bras, en leur permettant d'apprendre et de comprendre beaucoup de choses et en leur donnant l'occasion de faire des sports intenses. Chez les gens un peu moins civilisés, ont utilise la religion ou un nationalisme quelconque pour donner des certitudes aux enfants. On leur affirme qui ils sont. (Si on contrarie un intégriste sur une définition de lui-même qu'on lui a donné, c'est comme si on menaçait de le tuer.) Chez les gens non-civilisés, on ne s'occupe pas des enfants et on les laisse se procurer des psychotropes comme palliatifs.


Il y a des différences secondaires entre la cocaïne et l'héroïne :
Certains comparent le "plaisir" de l'héroïne aux plaisirs du sexe. Avez-vous déjà mangé des artichauts ? Quand ils sont préparés amoureusement par un bon cuisinier, nappés d'une fine vinaigrette, c'est un des mets les plus doux, les plus chauds, les plus exquis qui soient. On en porte le bien-être encore quelques jours après. Mais avez-vous déjà mangé de la pâte d'artichaut en boîte de conserve ? Ces boîtes sont faites avec de l'amidon, du parfum artificiel d'artichaut et de l'exhausteur de goût. Vous prenez la boîte de conserve, vous l'ouvrez, vous versez son contenu dans une casserole, vous versez de l'eau, vous portez à ébullition, vous versez dans une assiette, vous prenez la pâte avec une cuillère et vous la portez à votre bouche... Et bien ce n'est pas mauvais. Il y a à peu près la même différence entre du bon sexe et l'héroïne qu'entre des artichauts fermiers bien préparés et de la pâte d'artichaut en boîte de conserve. Si une personne vous dit que l'héroïne est meilleure que le sexe, vous pouvez donc en déduire qu'elle n'a pas la longue éducation nécessaire pour être un bon cuisinier. Un jour, elle a essayé de préparer des artichauts. Elles les a brûlés dans la casserole et les a servis à table en versant dessus un demi-litre de vinaigre. On peut comprendre qu'elle préfère ouvrir des boîtes de conserve. Elle pense qu'il vaut mieux manger un succédané d'artichaut que ne pas en manger du tout. Disons que l'héroïne procure un succédané du plaisir d'un câlin. La cocaïne procure un succédané du bien-être et de l'assurance que l'on ressent après un câlin. Personnellement, je préfère franchement apprendre à cuisiner. En attendant, il est hors de question que je me remplisse l'estomac de cet exhausteur de goût qui me donne mal à la tête et qui est une cause de débilité chez les enfants de familles pauvres en Asie.
(Cet exhausteur de goût est le glutamate de sodium : une molécule que notre cerveau utilise pour fonctionner, en très petite quantité. Quand de grosses quantités rencontrent les papilles gustatives de notre langue, les papilles sont affolées, désorientées, et disent au cerveau qu'il y a beaucoup de goût. Comme ce goût était indéfinissable, le cerveau va même commander de reprendre de cette nourriture, pour contrôler ! Des marchands de tabac ont ajouté du glutamate aux cigarettes pour augmenter l'accro. Le glutamate de sodium ingéré en grandes quantités s'accumule dans les neurones du cerveau de façon désordonnée et cause leur mort par empoisonnement. Lisez attentivement les petits caractères sur les boîtes de conserve que vous achetez, les soupes en sachet, les plats préparés, les sauces... Les petits caractères sont aussi intéressants sur les contrats d'assurance que sur les boîtes de conserve et les soupes en sachet.)

La réserve de dopamine du cerveau est limitée. Il n'y a qu'un petit réservoir de dopamine. Quand il est vide, il est vide. Il faut attendre des heures et des jours pour qu'il se remplisse à nouveau. Donc, pour obtenir la décharge de dopamine la plus intense possible, c'est à dire le flash de plaisir le plus puissant, il faut vider le réservoir de dopamine d'un coup. Comme un gros coup de pied sur une poire à eau. Il faut noyer le cerveau en quelques secondes de la concentration maximale de cocaïne ou d'héroïne. Donc il faut se piquer en intraveineuse ou fumer (le produit passe des poumons au sang en quelques secondes). Si on prend le produit par voie orale, en poudre par le nez ou par piqûre dans le gras de la peau, la concentration en produit n'augmente que lentement dans le sang. Il y aura libération de dopamine et sensation de plaisir, mais la dopamine est en train de s'écouler. Quand la concentration en produit devient enfin maximale... le réservoir de dopamine est presque vide, ainsi que les réservoirs des autres molécules utilisées par le cerveau. Il n'y aura donc pas de flash. Il faut choisir : ou un flash brutal et court, ou un bien-être plus calme et prolongé. Tout dépend de la méthode d'administration du produit.


L'éducation d'une personne peut avoir une grande influence sur sa sensibilité à la drogue :

Les psychotropes sont une chose importante. Ils touchent à ce que nous avons de plus fondamental : notre esprit. Mais leurs effets sont comme un mauvais bricolage. Ils agissent de façon plate et déstructurée. Ils ont de nombreux effets indésirés. Rien ne vaut le fonctionnement naturel du cerveau !

Je connais beaucoup de personnes intelligentes. Sans exception, ceux qui produisent des choses qui m'impressionnent sont totalement abstinents de tout psychotrope (sauf le café, pour un d'entre eux). Ceux dont les pseudo-performances intellectuelles sont vraiment pénibles sont ceux qui en consomment des quantités.

Personnellement je n'ai jamais consommé de drogues dures. Par prudence tout d'abord, par désintérêt ensuite. A force de ressentir l'état d'esprit des consommateurs de drogues dures que je connais et de les voir sniffer ou fumer leur came, je ressens un léger "beuh" quand je vois un petit tas de poudre blanche, brune ou rose.


Deux remarques :
La drogue est une source de problèmes graves, qui nécessite une solide prise en main sociale. Mais la drogue est aussi propre à l'homme. L'Homo Sapiens est un animal qui se drogue. Il y a un usage positif de la drogue. Par exemple quelques prises de drogues différentes sont une expérience importante pour un jeune adulte qui a une certaine maturité. Ce sont des "voyages culturels". Lors d'événements sociaux ou culturels rares et ponctuels, la prise de drogues fait partie de l'événement. On ne peut pas suivre la mélopée d'un musicien qui a fumé si on n'a pas fumé soi-même. Certaines personnes qui ont des problèmes physiologiques ou psychologiques graves retirent un bénéfice concret de l'usage quotidien et modéré de drogues, sans nuire à personne. Par contre l'usage régulier par des personnes qui manquent simplement d'identité ou d'amour doit être freiné. Non en interdisant la drogue, mais en procurant à ces personnes une identité et de l'amour, une vraie vie sociale. Il faut aussi imposer de la drogue de bonne qualité. La répression brute est le fait de personnes qui ne comprennent rien au problème et qui ne peuvent donc appliquer que des méthodes simples et bornées. Elles font partie d'un système culturel arriéré, tyrannique. Ces personnes considèrent leur statut et leur doctrine comme plus important que la santé des jeunes. Cela va plus loin encore : elles considèrent qu'il faut sacrifier des jeunes en exemple pour préserver la cohésion sociale. Comme dans la Gaule antique ou à Carthage, où on sacrifiait des enfants aux Dieux pour clamer l'identité de la cité. C'est pour ces raisons que même les contrôles de qualité sont interdits. Les jeunes ressentent implicitement ce mépris extrême et cette bêtise sectaire. Cela les pousse d'avantage encore vers la marginalité, vers ce qui leur apparaît dès lors comme la Lumière et qui semble remédier à leurs angoisses. Dans un monde où la majorité des personnes a un niveau culturel trop bas, les dérives et la maladie sont inévitables, que ce soit par la drogue, les armes, les accidents, le terrorisme ou la malnutrition. Si un jour le niveau culturel global monte suffisamment, il se passera la même chose que dans les tribus sauvages où les gens sont instruits. Les drogues qui ne présentent pas de danger aigu seront permises, acceptées. Leur qualité sera sévèrement contrôlée comme pour tout produit de consommation. Il y a aura un solide contrôle social des consommations, une instruction civique à la drogue. Personne ne devra plus se cacher pour consommer de la drogue. Toute tendance à abuser ou à faire de mauvais choix sera contenue par les amis, les parents, les médecins, les enseignants, la police de la route... La drogue sera gérée, par l'individu comme par la communauté. La santé des jeunes primera sur l'ordre social (ce qui constitue par ailleurs l'ordre social le plus solide). La répression n'entrera en jeu que par exemple dans les cas où une personne propose ou impose de la drogue à une autre. (Donc la publicité pour la drogue sera interdite. Ce qui n'est pas le cas actuellement, puisque la publicité sur l'alcool et le tabac existent toujours. Alors que ces drogues sont nettement plus dangereuses que certaines drogues douces pourtant interdites. Elles sont consommées par beaucoup sans aucune retenue, avec peu ou pas de gestion sociale, avec des accidents et des maladies graves à la clé. Preuve s'il en fallait une de l'absurde et de la malhonnêteté intrinsèque du système actuel. Les vendeurs de tabac et de mauvais alcools font affaire avec les décideurs. Ils payent des impôts. Et pour des raisons historiques l'usage de ces drogues n'est pas considéré comme un pied de nez à l'autorité.)

La drogue est utilisée par des prisonniers pour "s'évader". Cet usage peut se retrouver un peu partout. Je me souviens d'un plateau de télévision. Des mères dont l'enfant avait été tué par la drogue réclamaient une prise en charge beaucoup plus musclée par la police. Elles voulaient que la police aille partout où des enfants se droguent et les ramènent à leur familles. Elles étaient offusquées des propositions de tolérance et de prise en charge constructive que proposaient d'autres personnes sur le plateau. Soudain j'ai vu devant moi quel type d'enfance ces mères avaient donnée à leurs enfants. Une enfance faite d'ordres, de règles, de standards carcéraux. Une enfance en prison. Ces enfants étaient libres, mais uniquement dans l'imaginaire de leur mères. Quelque part ces mères préféraient que leurs enfants meurent plutôt qu'ils dérogent aux règles. C'est ce qu'ils ont fait.

Pour mieux comprendre les toxicomanes, rien ne vaut d'avoir eu au moins une crise de manque dans sa vie. Une méthode plus ou moins intéressante est de boire de fortes doses de café ou de boissons caféinées pendant un jour ou deux. Puis arrêter brutalement. On se sent persécuté, tendu... L'absorption de beaucoup de viande ou d'autres protéines animales pendant quelques jours favorise les angoisses de la crise de manque, parce que le cerveau n'arrive plus à traiter correctement les pensées, il est perdu. Ma plus virulente crise de manque a été causée par un moyen très simple, inattendu. Pendant quelques jours j'ai mangé des quantités importantes de glucides (des sucres, des pâtes, du riz, de la tarte...). On se sent bien quand on mange des glucides. On est chaud, semi-comateux. Puis j'ai arrêté d'un coup pour ne plus manger que de la viande et des légumes maigres. J'ai passé une nuit avec des sueurs froides, les membres endoloris de crampes. Les angoisses du manque m'ont causé des douleurs psychologiques abominable. Je revoyais sans cesse des torts que j'avais causé à d'autres personnes, des erreurs que j'avais faites. Le remords était insoutenable. Je pensais aussi à ce que je devais faire les jours suivants. Je sentais au plus profond de mon être que je n'arriverais jamais à le faire et que les conséquences en seraient désastreuses. La douleur des craintes était effroyable, à se tordre. J'aurais pu arrêter la crise simplement en prenant un peu de sucre. Mais je ne l'ai pas fait. C'était trop intéressant. Quand on comprend ce qui se passe, quand on sait au moins un peu le gérer, on n'est jamais tout à fait en détresse. Le fait de revoir mes erreurs passées de façon aiguë était aussi bon en soi. Cela m'a permis de les retraiter, de distinguer des lignes générales. On est un peu meilleur après une crise de manque bien gérée. Attention : de fortes doses de caféines peuvent vous détraquer l'organisme. Une hypoglycémie peut tuer. Demandez l'appui d'un médecin avant de jouer avec votre santé.

Beaucoup de psychotropes donnent simplement plus de goût, de saveur aux rêves. Si une fille se refuse à vous, il ne vous reste plus qu'à rêver d'elle. Si vous prenez alors une tasse de thé surdosée, vous pourrez sentir votre affection pour cette fille avec plus de force. Vous pourrez même rêver qu'elle vous aime et sentir, comme un feu qui se met à brûler en vous, cet amour qu'elle éprouve pour vous. Tout est faux, mais vous en éprouvez un profond ravissement. Ce type de procédé n'intéresse bien évidemment que les personnes qui ont des problèmes affectifs, un handicap social. Et cela risque fort d'augmenter encore leurs problèmes. Les personnes bien dans leur peau, qui obtiennent de la vraie affection, n'ont que faire de ces moyens.

Un vieil ami très cultivé et un peu héroïnomane m'a expliqué ceci : "Toute personne a des antennes. Avec ces antennes elle sent les personnes autour d'elle. Elle sent leurs problèmes, leurs besoins... Cela fonctionne toujours au moins un peu. Quand tu prends de l'héroïne, cela coupe tes antennes. Tu deviens insensible aux personnes. Tu ne te gares plus quand quelqu'un veut passer, tu peux même rester sans broncher à côté d'une personne qui meurt et qui a besoin d'aide. Pour des enfants, avoir des parents drogués c'est abominable." Il y a là une forme de concurrence entre l'héroïne et la Société. Les relations sociales : s'occuper de ses proches, passer du temps avec son compagnon... c'est ce qui procure le bien-être le plus intense dans la vie. Mieux on sait faire cela, plus on considère l'héroïne ou la drogue en général comme une pauvre chose, un handicap. Par contre si on est coupé des autres, un peu perdu, on peut trouver un plaisir dans la drogue. Plus on en prendra, plus encore on sera coupé des autres. On mourra socialement avant peut-être de mourir physiquement. Les jeunes sont souvent à une charnière entre ces deux extrêmes : ils prennent de la drogue pour s'intégrer dans une bande. Tabac, hashish, alcool... Ils ont des problèmes de communication à cause d'une enfance vide. Ils tentent de les colmater avec des adoucissants de problèmes sociaux. La majorité finira par s'intégrer socialement, au moins un peu. Quelques uns sombreront dans la drogue. Un indice du fait que le social est plus fort que la drogue se voit par exemple dans le soin des grands brûlés : même la morphine n'est pas suffisante pour éviter que le blessé ne souffre quand on change ses bandages. On a pourtant trouvé une solution : il faut lui parler, s'occuper de lui. Une infirmière s'occupe exclusivement de lui parler, de lui expliquer ce qui se passe et de se préoccuper de lui. Alors la douleur devient supportable.

Quand on reproche à un jeune le fait qu'il fume cela le conforte en général dans le fait de fumer. Car il croit qu'en fumant il se démarque. Il y a toutefois une approche que j'ai pu utiliser avec succès : la pitié. J'ai vu une amie de 14 ans tenir une cigarette pour la première fois. Je me suis arrêté sur place et je lui dit : "Tu es en déjà là ? Pauvre choute...". Toute la compassion et la détresse du monde se lisaient sur mon visage et dans ma voix. J'ai tourné les talons pour continuer mon chemin. Mais du coin de l'oeil j'ai pu la voir écraser sa cigarette. Elle avait raté son coup : je ne l'avais pas prise pour une grande fille. Je l'avais prise pour une victime. Il est très important dans cette démarche d'être sincère. Si vous dites à un jeune que vous avez pitié de lui dans le seul but de le faire arrêter de fumer, il va le sentir et il va comprendre que vous essayez de vous jouer de lui. Donc il va fumer d'avantage. Il faut que vous pensiez réellement ce que vous dites. J'ai des compétences de base en médecine et en psychologie et je tiens beaucoup à cette jeune fille. J'étais réellement malheureux et apitoyé quand je l'ai vue en train de fumer. Une autre exigence est qu'il faut accepter de montrer ses sentiments. En lui montrant ma détresse, je reconnaissais implicitement que j'ai des sentiments pour elle.

De nombreux paramètres interviennent dans une toxicomanie. Et une toxicomanie n'est pas forcément liée à l'usage de psychotropes chimiques. Une religion, une passion, le pouvoir, le jeu... De nombreuses choses peuvent être la substance d'une dérive toxicomane. Mais le paramètre fondamental pour ne pas être toxicomane me semble être l'ouverture du cerveau sur le Monde. Au départ, on naît toxicomane. En ce sens qu'un enfant présente les caractéristiques d'une toxicomanie : Cet état de choses est normal chez un enfant. Les êtres humains sont des marsupiaux. Ils mettent au monde un enfant qui est totalement incapable de quoi que ce soit, dont les os ne sont même pas entièrement formés et qui doit être complètement protégé. La croissance physique et mentale de cet enfant se fera au fil des années. Ce n'est que lentement, a mesure des apprentissages, qu'il deviendra une personne capable de se protéger, de comprendre les choses, de se débrouiller dans la vie, de dialoguer, de sentir les émotions d'autrui et de faire sentir ses propres émotions à autrui et de faire des choses rentables, bien calculées. Le fait qu'un enfant arrive à se développer, à devenir adulte, dépend de plusieurs facteurs. Essentiellement de son caractère propre et de l'environnement où il vit. Certains enfants sont ainsi faits à leur naissance que même dans un environnement sectaire il arriveront à se développer. D'autres, même dans un environnement raisonnablement ouvert et présent continueront à fonctionner comme des enfants. C'est ce fait de fonctionner comme un enfant qui est le moteur de la toxicomanie. Car la drogue, quelle qu'elle soit, permet de recréer cette bulle de sécurité et de rêve propre à l'enfance. On critique souvent les drogues, les religions, les jeux vidéo, la télévision, l'école... Mais ce ne sont pas ces choses en elles-mêmes qui posent problème. C'est l'usage qu'on en fait. Si on en a un usage adulte elle permettent de devenir plus adulte encore. Si on en a un usage toxicomane elles vous feront sombrer d'avantage encore dans la petite boîte de l'isolement social et du délire intérieur. Le rôle d'un bon parent n'est pas d'interdire l'usage de ces choses. Son rôle n'est pas non plus de laisser faire l'enfant à sa guise. Le rôle d'un bon parent est d'apprendre à son enfant à avoir un usage plus ou moins adulte de ces choses. Parfois il faut temporairement interdire une chose à l'enfant. Parfois il faut l'encourager, presque le forcer à au moins en essayer une autre. L'important est de globalement laisser l'enfant découvrir les pièges et les bonheurs par lui-même. Il ne faut pas lui proposer une chose trop tôt, au risque de le blesser, de l'estropier. Il ne faut pas non plus la lui proposer trop tard, au risque que son cerveau se soit déjà fermé pour cette chose et qu'il reste handicapé à vie. En général il vaut mieux procéder graduellement. Il est bon de laisser un enfant entendre parler d'une chose très tôt, sans pour autant l'y confronter. Les adultes doués sont souvent des enfants qui passaient des heures sous la table à écouter discuter les adultes. L'enfance est faite pour rêver et gaspiller à outrance de petites choses, en toute sécurité. C'est ainsi qu'on apprend. Si on impose trop tôt à un enfant les charges de la vie, il glissera presque automatiquement vers l'une ou l'autre forme de toxicomanie. Si on protège trop un enfant, s'il n'apprend rien, à l'âge adulte il ne supportera pas le monde réel et prendra également une toxicomanie. Certaines tribus ont un très bon système à cet égard. Elles parlent de tout aux enfants et les laissent voir et entendre les adultes à l'ouvrage. Mais elles attendent qu'un enfant ou une personne demande explicitement une charge, avant de la lui confier. Elles attendent que la personne soit prête et demandeuse avant de la laisser suivre activement un cour à l'école ou assumer une responsabilité civile. J'ai vu récemment un cas assez grave d'immaturité, chez un enfant qui a déjà 12 ans. Il n'a plus de père, n'a pas de frères et soeurs et sa mère l'empêche de faire du sport avec d'autres enfants. C'est un gentil garçon mais il est insensible aux émotions d'autrui. Si on ne s'occupe pas de lui, il devient impossible. Si quelques personnes sont réunies et parlent pourtant de choses qui l'intéressent, au bout de quelques minutes il tirera sa "Game Boy" de sa poche et se mettra à jouer comme un malade. Il rêve de faire des choses immenses mais est incapable de connecter une ampoule à une pile électrique. C'est un toxicomane par infantilité. Pour le moment sa mère crée autour de lui cette bulle de sécurité dont tout enfant a besoin. Mais plus tard, n'ayant rien appris au cour de son enfance, il ne pourra survivre qu'en se droguant. Sans toxicomanie, les angoisses qu'il ressentira dans le vide où il se trouve seront insupportables. Si on s'occupe activement de chaque enfant, en s'adaptant à chaque enfant, presque aucun ne dérivera vers la toxicomanie. J'ai vu des dizaines de parents qui ont lu des textes explicites et bien-pensants comme celui-ci et qui pourtant continuent à faire des toxicomanes de leurs enfants. Etre un bon parent, c'est un petit moteur qui existe en nous, c'est une pulsion qu'il faut découvrir. La meilleure façon d'activer ce moteur est de voir et sentir d'autres parents à l'oeuvre. Il faut avoir vu un parent compétant refuser d'aider son enfant dans le but qu'il apprenne à se débrouiller seul. Il faut avoir senti ce dialogue entre le parent qui propose de ne pas aider et l'enfant qui accepte le challenge. Il faut avoir vu l'inverse aussi : le même un parent compétant qui insiste pour aider son enfant et l'enfant qui revendique qu'on le laisse faire seul. Si l'instinct du parent est là, tout finit toujours bien. La construction se fait. L'enfant devient lentement son propre parent et son propre enfant.

J'ai fait une expérience d'auto-hypnose fort intéressante. Il serait impossible d'en donner une recette précise ici parce que j'ai fait les choses en fonction de ce que je ressentais. Un levier important a été de boire une grande quantité de café avant d'aller dormir la nuit (et de mettre des bouchons dans les oreilles). L'état d'hypnose dans lequel je me suis retrouvé m'a permis d'obtenir des réponses à des questions que je me posais. J'ai aussi pu voir de façon globale des choses que je savais liées mais dont je n'arrivais pas à saisir l'ensemble. Ce que j'ai fait là est le contraire de la démarche d'un toxicomane. Un toxicomane utilise la drogue pour se rêver éveillé un petit monde conforme à ses désirs. Moi j'ai utilisé une drogue (la caféine) pour faire un passage en sommeil qui m'a permis de mieux comprendre le monde dans lequel je vis, de mieux l'accepter. C'est une démarche shamanique.

Un lecteur m'a demandé si j'avais des renseignements sur les drogues que l'on peut trouver facilement ou fabriquer soi-même. Faites attention avec ce type de recherche. Dans des magasins ou grandes surfaces vous pouvez trouver des psychotropes relativement puissants. Il y en a de très dangereux, comme l'alcool ou le tabac. L'alcool peut vous rendre alcoolique à vie. Quelle que soit votre bonne foi ou la force de votre personnalité vous ne pourrez pas l'empêcher : c'est un phénomène purement physiologique qui va se déclencher dans votre organisme. De même pour le tabac. La consommation d'alcool ou de tabac a des effets destructeurs très graves. La consommation des deux ensemble vous détruira puissance deux. Vous pourrez vous raconter toutes les histoires que vous voulez pour enjoliver ou excuser votre toxicomanie, vous ne serez qu'une victime de plus. Seule la consommation modérée d'alcools de qualité, dans des circonstances culturellement justifiées, peut être bonne pour la santé. En grande surface il y a aussi des psychotropes plus acceptables comme le chocolat, le thé ou le café. Certaines tisanes peuvent avoir de l'effet. En pharmacie vous trouverez toute une panoplie de gélules de plantes en vente libre : gingko biloba, spyruline, ginseng... Demandez le folder gratuit à votre pharmacien. Vous pouvez trouver ces plantes également dans des magasins de diététique ou des herboristeries. Les prix peuvent être beaucoup plus bas mais la qualité aussi : les plantes peuvent carrément être moisies ou ne contenir aucun principe actif. N'essayez jamais les recettes plus ou moins chimiques que vous pourrez trouver. Les substances produites ont souvent des effets destructeurs. Un classique est l'héroïne de synthèse, qui détruit le cerveau et vous donne une maladie de parkinson incurable pour le temps qu'il vous reste à vivre. Des accidents plus fréquents sont une destruction des reins. Les pilules que l'on trouve dans les raves parties sont fabriquées de cette façon. Personnellement je ne verrais aucun inconvénient à ce que mes enfants prennent des drogues. Mais si je devais apprendre qu'ils ont acheté et pris de ces pilules fabriquées dans des labos clandestins, ce serait peut-être la seule fois où je pourrais les passer à tabac. Pour le cannabis, la solution simple et de bon goût est de faire un voyage culturel aux Pays-Bas. Les autorités de ce pays ont un niveau suffisamment élevé pour avoir plus ou moins légalisé le cannabis. Vous y trouverez de sympathiques "coffee shop". En cherchant un peu, vous en trouverez où on ne vend que des choses de qualité, sur menu explicatif. Vous pouvez aussi trouver du cannabis dans les pays où c'est interdit, mais en général de piètre qualité, cher, coupé avec des substances dangereuses et en sachant que votre argent va servir à alimenter les mafias. Si vous voulez essayer des psychotropes puissants et "intéressants" comme les champignons hallucinogènes ou le peyotl, il va falloir vous intégrer à un milieu où on en consomme. Ces produits circulent partout mais ils sont confidentiels. Choisissez un milieu de gens sérieux et positifs, qui n'utilisent que de bons produits et qui peuvent vous donner des explications et vous accompagner. Dans d'autres milieux vous courrez de gros risques, même si les gens ont l'air très sympathiques et engageants. Surtout pour la consommation de substances hallucinogènes, il faut être accompagné : par une personne expérimentée avec laquelle vous n'avez pas d'attaches particulières. Nous sortons à peine d'époques où le peuple était considéré comme une main-d'oeuvre servile, qu'il faut casser et confiner à l'usage prévu. Je suppose que la situation va continuer à s'humaniser. Dans un certain temps il sera possible de faire usage en toute légalité de substances produites avec la qualité pharmaceutique et d'être accompagné par des médecins qualifiés. Tout comme cela se passait dans les tribus, où on allait dans la case du shaman pour prendre des hallucinogènes et faire des "voyages" sous sa surveillance serrée.

Tout être humain cherche à progresser. Il veut enrichir et fluidifier son cerveau. Une chose dont je me suis rendu compte est que l'hypnose est un outil très performant pour permettre de passer certaines étapes. Je dirais même que c'est indispensable. Cela permet de devenir plus efficace, plus adulte... C'est un couteau suisse à améliorer ce qu'on a dans la tête. Dans beaucoup de cultures tribales l'hypnose est couramment pratiquée. C'est un élément essentiel des rites initiatiques. Mais dans notre société c'est presque complètement occulté. Je me demande si certaines personnes n'ont pas une famine de cet état d'hypnose qu'elles n'arrivent pas à atteindre. Chacune de leurs prises de drogue est peut-être une tentative inconsciente de passer en hypnose. Leur cerveau est en demande de cela. Mais sans préparation et sans accompagnement adéquat, elles n'y arrivent pas. La première chose à dénoncer, c'est que la drogue ne permet pas en elle-même d'accéder à l'hypnose. Cela se fait parfaitement sans consommer la moindre trace de drogue. Dans beaucoup de cas il est même indiqué de ne surtout consommer aucun psychotrope. Si on n'est pas capable de se mettre en état d'hypnose, par soi-même ou aidé par une personne compétente, cela ne sert à rien de prendre de la drogue. Il faut d'abord apprendre l'hypnose. Certes les drogues peuvent être des ajouts intéressants. C'est pour cette raison que les shamans les utilisent. Ils peuvent aussi utiliser des drogues pour débloquer la situation d'une personne qui n'arrive pas à se mettre en état d'hypnose. Par exemple pour ouvrir un peu l'esprit de la personne, lui faire accepter qu'il y a d'autres choses. Ou pour la détendre un peu. Ou encore pour l'aider à s'isoler du monde extérieur. Les drogues ont leur place dans la technologie de l'hypnose. Mais une pilule ne fait pas l'hypnose. De toute façon, avec ou sans drogue, l'hypnose sans préparation est une mauvaise idée. Il faut un minimum d'enseignement préalable. Pour résoudre le problème de tous ces toxicomanes candidats-hypnotisés qui bégayent leur passage, il faudrait changer notre modèle de Société. Il faudrait permettre à chacun de devenir initié, de réussir son passage. Il faut restaurer nos droits tribaux.

Après réflexion, je me dis qu'on peut aussi bien inverser le raisonnement qui se trouve dans le paragraphe ci-dessus. Les toxicomanes utilisent peut-être les drogues pour éviter l'hypnose, pour s'assommer. Parce que cela leur fait peur. Cela peut même causer une terreur du vide chez certains. Il faut de la confiance et de la préparation, que ce soit pour sauter à l'élastique ou pour entrer en hypnose. C'est naturel pour certains, pas pour d'autres. Peu importe : dans un cas comme dans l'autre, la toxicomanie relève d'un manque d'initiation. (L'usage des drogues pour éviter l'hypnose est à mettre en parallèle avec cette autre drogue que sont l'endoctrinement et la marche au pas. Le but est le même : contrôler l'hypnose, éviter les grands envols.)

La question n'est pas de savoir si vous fréquentez un milieu où on consomme des drogues ou un milieu où on n'en consomme pas. La question est plutôt de savoir si vous fréquentez un milieu qui un niveau spirituel bas ou un milieu qui a un niveau spirituel élevé. Si vous fréquentez un milieu bas, vous aurez régulièrement des problèmes et parfois des problèmes graves. Vous allez y perdre votre santé. Il y a deux types de milieux bas : ceux où on condamne la drogue avec véhémence et ceux où on en consomme à outrance et n'importe laquelle. Ces deux extrêmes peuvent d'ailleurs se rejoindre. Je me souviens d'une petite fête entre amis. Au moment où la question de la légalisation du cannabis est abordée l'un des convives se fâche est dit avec force qu'il est hors de question que le cannabis soit légalisé. On aurait dit qu'il était prêt à égorger de ses doigts le premier parlementaire qui aurait osé aborder le sujet. Quelques heures plus tard il nous quitte quelques instants. Sans le faire exprès je passe l'endroit où il se trouvait. Il était en train de téter un joint et à l'odeur je peux dire que c'était de la m... Dans les milieux élevés on consomme de la drogue, parfois : quand il y a une bonne raison de le faire. On ne consomme que des produits de qualité et en prenant toutes les précautions de sécurité nécessaires.

On se représente souvent un drogué comme un être faible et mou qui a besoin de son produit pour se sentir vivre. Les cadres dynamiques qui prennent de la cocaïne correspondent également à cette image : ils cherchent à se dynamiser. Mais je remarque que l'inverse est vrai aussi : beaucoup de personnes prennent des drogues parce qu'elles débordent d'énergie et ne savent qu'en faire. Elles cherchent à se calmer, à s'apaiser. Bruce Lee disait que fumer un pétard était le seul moyen de calmer "cette machine qui tourne en permanence dans sa tête". On le voit par exemple chez les enfants. Les toxicomanies des enfants sont le vautrement devant la télévision ou l'absorption de crasses qui détraquent leur organisme : chips & sucreries. Je donne parfois de longues explications à des enfants. Au bout d'un temps, certains d'entre eux ne tiennent plus en place. Ils n'arrivent plus à m'écouter, ils se mettent à manipuler des objets avec frénésie ou à avoir des mouvements saccadés des pieds et des mains. Un réflexe que j'observe alors chez eux est ce vautrement devant la télévision, comme un toxicomane qui court se faire un shoot. Avec ou sans chips, suivant les cas. Ils ne regardent bien sûr que des dessins animés vides de sens ou des séries télévisées ineptes. Il y a des documentaires ou des émissions culturelles essentiels à la télévision. Ces choses merveilleuses sont réduites à néant par des familles qui interdisent la télévision ou s'en servent comme drogue pour leurs enfants. Certains parents sont carrément des dealers : ils marchandent les heures devant la télévision en fonction des points rapportés de l'école. Il existe pourtant une solution noble et évidente pour permettre aux enfants de faire jaillir leur énergie : le Sport. Encore faut-il que cela soit possible. Souvent chez ces enfants télémanes, leurs parents ont refusé de les inscrire dans un club sportif, ne leur offrent aucun équipement de sport ou les font vivre dans un quartier où on les regarde de travers s'ils essayent de faire un peu de volley-ball sur une place publique. (L'élément le plus insidieux à mon sens est l'école. Ce matraquage de matières stériles qu'on leur impose huit heures par jour sert d'abord à tenir les enfants. La Société est folle de terreur à l'idée de la Révolte des Enfants. A la base l'Ecole est une chose merveilleuse. Elle est l'essence de l'Humanité. On l'a détournée de son rôle initial pour en faire une fumerie d'opium virtuelle. Il n'y a qu'à voir comment on traite les enseignants qui ont le don, qui ont quelque chose à communiquer. Depuis des dizaines d'années les ministères leurs imposent des "méthodes d'enseignement", toutes plus fantasmatiques et plus creuses les unes que les autres. Les salaires sont réduits à une peau de chagrin. On fait tout pour ne garder que des enseignants-fonctionnaires, qui ânonnent les matières. L'impact d'un enseignant qui n'a pas le don est négatif. C'est un désenseignant, qui vous donne le dégoût des matières et de vous-mêmes. Cela me fait penser aux projets d'Hitler. Au départ il voulait faire des polonais une main-d'oeuvre de basse catégorie, qui n'irait jamais à l'école et qui serait utilisée comme robots industriels ou agricoles. On lui a fait remarquer qu'il était tout de même nécessaire que ces robots sachent un peu lire et écrire, et connaissent les quatre opérations mathématiques. Sinon ils seraient inutilisables dans le tissu industriel. Hitler (qui était un homme avec qui on peut discuter, quoique certains en disent), a reconnu le fait et a changé ses plans. Les polonais auraient droit aux premières années d'école primaire. Et bien, en gros, c'est qu'on fait actuellement avec les enfants dans les démocraties. D'après vous, qu'aurait prévu Hitler pour les enfants polonais une fois sortis de leurs premières années d'école primaire ? Il les aurait occupés, pardi. A des choses utiles, bien entendu : petits travaux dans les champs et les usines, bien fatiguants mais pas mauvais pour la santé. Le sort des enfants polonais aurait été analogue à celui des congolais vers la fin de la colonie belge : soignés aux petits oignons, portés au meilleur état de santé, mais privés de tous droits et maintenus en ignorance. Dans les démocraties on n'envoie pas les enfants dans les usines. On les garde dans les écoles. Comme dans les usines, on leur fait faire à longueur de journées des travaux qui ne leur apprennent rien ou presque. La mascarade est bien organisée. Les parents ont sincèrement l'impression que leurs enfants apprennent des choses. Ils sont anxieux à l'idée qu'ils n'adhèrent pas 100% à l'école. En réalité les matières enseignées ne sont que des structures superficielles que l'on apprend par coeur et puis que l'on oublie ; des coquilles vides joliment garnies. Les exercices sont téléphonés : ils sont tous construits autour des mêmes schémas et peuvent être réussis sans la moindre compréhension de la matière. Il faut juste être capable de s'adapter à quelques permutations de phrases dans les énoncés. Comment sortir de cette horreur ? Un point essentiel à mon sens est d'éviter la théorie du complot. Elle est fausse et ne ferait donc que servir nos ennemis de l'Extrême Droite ou de l'extrême Gauche. Le désenseignement n'est pas organisé par une personne ou une famille. C'est notre Société qui est ainsi, dans son ensemble. C'est son niveau culturel. Au pire, il y a quelques fonctionnaires d'Etat qui quand on leur en parle prennent peur. Ils ne comprennent pas de quoi il s'agit mais sentent que cela touche à quelque chose d'important. On ouvre un gouffre devant leurs pieds, ils ne peuvent que reculer. Cela ne sert à rien de leur en vouloir. Attaquer l'Etat est vide de sens. Le problème est collectif, la solution est donc collective. Il faut que tout le monde se renseigne et comprenne : enseignants, parents, fonctionnaires, éditeurs de livres scolaires, inspecteurs de l'enseignement, ministres et surtout les enfants eux-mêmes. L'Ecole doit devenir une structure beaucoup plus complexe qu'elle ne l'est actuellement. Un petit nombre de choses doivent être enseignées de façon obligatoire, avec beaucoup plus de force et de présence qu'actuellement. Lire et écrire, par exemple. Ainsi que le rôle et le mode de fonctionnement des structures du pays. Ou les notions de base d'éthique. Ce sont des choses avec lesquelles il ne faut pas plaisanter, qui doivent se trouver sous contrôle parlementaire et bénéficier de l'appui des forces de l'ordre. Mais cela ne peut prendre qu'une toute petite partie du temps des enfants. Pour le reste il faut jouer sur leurs instincts naturels. Essentiellement il faut répondre à leurs besoins ou stimuler ces besoins. Les enseignants doivent être des personnes que l'on vient trouver, que l'on implore de donner un cours. Il faut casser le système de l'école-camp de concentration en faisant venir beaucoup plus de personnes à l'école : des personnes issues du monde réel. Il faut permettre aux enfants de faire au moins de brèves incursions dans le monde réel. Si une activité industrielle ne présente pas de danger, on doit donner aux enfants la possibilité de la pratiquer. On apprend plus en quelques semaines de travail réel qu'en 300 heures de cours de Mathématiques ou d'Histoire. En particulier on apprend l'importance des Mathématiques et de l'Histoire... Un ami qui a une longue vie derrière lui me fait remarquer que de son temps les enfants qui sortaient de sixième primaire savaient écrire sans faire de fautes d'orthographe. Ils connaissaient le sens des mots et étaient capables de prendre des responsabilités. De nos jours les enfants du même âge ont souvent le niveau qu'avaient jadis les enfants en troisième primaire. Et encore : en troisième primaire on savait faire les quatre opérations. J'ai vu beaucoup de jeunes adultes qui en sont incapables.)

Il est expliqué plus haut que les drogues (si elles sont bien utilisées et dans ce cas en général on préfère s'en passer) permettent de mieux s'adapter au Monde et d'aider à épanouir certaines facultés du cerveau. Une troisième fonction consiste à aider à révéler le subconscient. Le subconscient est un ensemble collectif de mécanismes "aveugles" dans notre cerveau qui nous poussent à adopter certains comportements. On pourrait le comparer à l'instinct des animaux. On cherche parfois des explications très compliquées pour expliquer ou justifier un acte qu'on a posé ou un comportement qu'on a eu. En réalité on a simplement été poussé par notre subconscient. Ce sont des mécanismes internes qui nous poussent à faire une chose, à adopter un mode de vie, à percevoir le Monde d'une certaine façon... Ces pulsions subconscientes sont notre nature. Il est bon pour un être humain d'avoir senti au moins dans les grandes lignes quelles sont les pulsions de base de son subconscient. Cela permet de vivre en accord avec ces pulsions. Cela permet également de lutter contre elles quand c'est nécessaire, de les infléchir dans de meilleures directions. Ainsi l'on peut devenir quelqu'un de performant. On aura par exemple un métier en accord avec ce que notre cerveau sait faire et aime faire. L'idéal est d'arriver à cela à un âge encore jeune, avant de prendre des décisions qui valent pour la vie. Une Société culturellement développée a bien sûr comme objectif de permettre ce travail à chacun. Les divinités dans les temples ou les héros dans les romans sont autant de symboles de nos différentes pulsions ou mécanismes subconscients. Nous apprenons à nous connaître nous-mêmes en faisant vivre ces divinités ou ces héros dans nos rêves éveillés. L'idéal est de fréquenter une personne chez qui un de ces mécanismes fonctionne. On vit bien dans ces sociétés. Si quand on était enfant on a été bien traité, on cherchera toujours à orienter ou canaliser les pulsions de son subconscient d'une façon qui est profitable à la Société. Il n'en va pas de même dans les sociétés arriérées gouvernées par des sectes. Dans ces sociétés-là on édicte un ensemble de règles. Ces règles ne sont que le fruit des superstitions et des intérêts primaires des dirigeants. Mais elles sont présentées comme des vérités cosmiques, absolues et inaltérables. Par exemple on condamne sévèrement l'homosexualité ou le fait de changer d'épouse toutes les quelques années. Pourtant ces pulsions-là ne font de mal à personne, si elles sont bien gérées. Les autorités répriment le subconscient naturel des individus. Elles imposent à la place un comportement standard, pauvre et superficiel. Dans ces sociétés tout ce qui permet de révéler le subconscient véritable des individus est condamné : livres atypiques, musique d'artistes, oeuvres d'art délirantes... Bien entendu la drogue aussi est condamnée. Quoique : les trafics de drogues et leur usage malsain sont en général tolérés. Parce que cet usage-là de la drogue ne menace pas la secte au pouvoir. Cela ne permet pas aux gens de découvrir leur subconscient. Cela leur permet tout au plus s'abrutir, donc de mieux supporter la dictature. Le fait que beaucoup de gens fassent de petites choses illégales, comme se droguer, est un avantage pour les dirigeants : cela permet de menacer tout le monde d'arrestation ou d'amende. Donc cela permet de contrôler les gens, de les convaincre de se tenir calmes. Beaucoup de personnes en meurent ou contractent des maladies incurables. Mais sacrifier une partie de la population est dans l'ordre des choses. Cela permet par exemple d'effrayer l'autre partie, donc encore une fois de mieux la contrôler... Mais les dirigeants frémissent de peur à l'idée que la drogue soit légalisée. Si les gens pouvaient aller à l'hôpital pour prendre de la drogue de qualité en présence d'un médecin, d'un psychologue, d'un artiste et d'un moraliste, ils découvriraient leur subconscient. Ils comprendraient l'absurde et la mocheté morale des règles de la secte. Tout son système s'effondrerait. (Notez que parfois la secte avait au départ des intentions réellement bonnes. Dans des contrées violentes et culturellement arriérées, les individus découvrent des parties de leur subconscient, de façon anarchique. Cela en mène beaucoup à devenir des monstres. Pour mettre fin à une partie des problèmes de ces contrées, imposer un subconscient standard est une méthode qui a fait ces preuves. Tout cela est très discutable, mais il faut se mettre à la place des dirigeants. Il faut tenir compte de leur niveau de compétence. Ils font réellement pour mieux. Ils ne peuvent pas deviner les conséquences et les abus qui suivront, ni qu'il existe mieux.)

L'abstinence est certainement un problème moins grave que l'assuétude. Cela peut malgré tout être un problème. On entend parfois des gens "très responsables" expliquer que si les drogues étaient autorisées ce serait une hécatombe. A les écouter les rues seraient jonchées de morts, seringues aux bras. Je remarque tout le contraire. Moi-même je n'ai touché à l'alcool qu'à une âge assez avancé, près de la trentaine, quand j'étais devenu certain que cela ne représentait plus un danger pour moi. De même je vois beaucoup de personnes refuser avec conviction les toxicomanies. Elles ne refusent pas seulement les drogues illégales, elles refusent avec la même force des drogues comme le café, la télévision ou le GSM. Ces drogues présentent peu ou pas de danger pour la santé et sont socialement très bien acceptées. C'est uniquement l'assuétude - le risque de ne plus pouvoir s'empêcher d'en consommer - qui motive ces personnes. C'est une question de dignité personnelle, de convictions, de système de valeurs... Il appartient à chacun de juger de ce qui est bon pour lui. Mais je crois que globalement il y a une exagération. Notre société a un niveau social trop bas pour gérer correctement les drogues. Cela se voit chez les personnes qui abusent des drogues mais aussi chez ceux qui sont fanatiquement abstinents. Concrètement, certaines des personnes dont je parle ici auraient vraiment besoin d'un poste de télévision à la maison. Par exemple pour voir certains documentaires de qualité. La présence de ce poste de télévision chez elles serait bien sûr une menace concrète. Le risque le plus élevé est représenté par les visiteurs. Certains sont prêts à supplier ou à manipuler pour s'affaler devant l'une ou l'autre émission vide-esprit. C'est la mort de la vie intellectuelle. Finies les discussions intéressantes. Si on a assez de force de caractère pour refuser sa dose au visiteur, cela crée des conflits. On perd des amis. C'est à ce niveau qu'intervient l'éducation du pays. Personne ne se permettrait de râler parce qu'on lui refuse de s'allonger dans le salon et fumer une pipe d'opium. Un jour il en ira de même avec la télévision. On ne considérera plus celui qui refuse d'allumer sa télévision comme un aigri. On s'occupera de celui qui reste affalé devant sa télévision, on le soignera. Les choses évoluent déjà. Le tabac, par exemple, vient de passer la frontière. Peu de gens osent encore imposer leur fumée aux autres. On parle de plus en plus de véritable campagnes de prévention contre le tabac. Un jour peut-être le tabac n'existera plus que sous forme de cigares de qualité, que l'on fumera de façon exceptionnelle. Alors le tabac retrouvera sa noblesse. Un de mes amis refuse obstinément d'acheter un GSM. Pourtant il en a un usage professionnel évident. Une des raisons à cela est qu'il voit des adolescents autour de lui complètement accros à leur GSM, qui dépensent des fortunes dans des conversations débiles. Cela le dégoûte. A mon avis, ces personnes devraient faire comme moi avec l'alcool : se permettre la chose quand on est sûr de pouvoir la contrôler. C'est aussi un service à rendre à la société : il faut se confronter au risque, pour apprendre à le gérer. Il faut apprendre à refuser d'allumer la télévision en vexant le moins possible le visiteur. On lui apprend par là quelque chose d'essentiel. Il faut apprendre à abréger une conversation téléphonique de façon polie. Il faut le faire en présence d'adolescents, pour leur montrer la voie de la maturité. Je dois parfois expliquer à des interlocuteurs que non, je n'ai pas abrégé le coup de téléphone parce que suis fâché. Je l'ai abrégé parce que je suis responsable. Mes coups de fils durent rarement plus de quelques secondes et je dépense moins de 5 € par mois en GSM. L'abstinence n'est jamais mauvaise et elle est parfois vitale. Mais notre société a besoin d'apprendre la responsabilité et l'entraide. Pour développer ces choses il faut parfois savoir se confronter au risque. Il faut vivre avec le risque et lui survivre. Dans le doute, continuez à vous abstenir. Ecoutez votre peur mais ne vous laissez pas gouverner par elle. Les drogues ne sont pas dangereuses en elles-mêmes, c'est l'usage qu'on en fait qui est dangereux. Certaines drogues sont nécessaires, pour des raisons pratiques. Si vous voulez que leur usage devienne sage, participez à le développer. En Afrique Noire le problème est abordé de façon symbolisée en continuant les anciennes traditions dans la vie moderne. Le démon "Mami Wata", par exemple, est décrit comme une jeune femme. Vous pouvez apprendre son culte et l'invoquer. L'aspect bénéfique de Mami Wata est de vous apporter les bienfaits de la technologie, comme le GSM, une voiture, l'accès Internet, la télévision, une chaîne Hi-Fi... Son côté maléfique est de vous rendre dépendant de ces choses, de s'en servir pour causer votre perte. A vous de faire pour un mieux, de vivre le culte de Mami Wata de façon positive. Vous apprendrez à résister au côté obscur, à en déjouer les pièges. Vous pouvez discuter de Mami Wata avec vos voisins, vos amis, votre famille...

Dans leur bon usage, les drogues servent à communiquer avec les autres et avec soi-même. Dans leur mauvais usage, les droguer servent à s'isoler des autres et de soi-même. Cela vaut pour toutes les drogues : la télévision, le téléphone, les jeux vidéo, Internet, le cannabis, l'opium, le peyotl, la politique, les clubs de rencontre... Certains ont tendance à faire feu de tout bois pour améliorer les choses. D'autres s'abaissent ou détruisent un peu plus à chaque nouvel outil qui leur est présenté. Le rôle de l'Ecole devrait presque se borner à faire des gens des constructeurs. Le reste en découle.


J'ai essayé de mettre au point "un régime alimentaire pour toxicomane". La démarche est un peu naïve mais pas inintéressante. Elle n'est pas très dangereuse non plus. En tout cas elle l'est moins que nombre de comportements toxicomanes. Demandez l'avis d'un médecin avant de faire quelque expérimentation que ce soit à votre tour. Je me suis dit qu'en gros les drogues présentaient une série de problèmes :
Un élément central dans tous ces problèmes est le fait que les toxicomanes prennent le produit d'une façon qui crée une brusque concentration de drogue dans leur sang. Même les façons "douces" de prendre de la drogue sont encore trop brusques à mon sens, comme par exemple prendre la drogue par voie orale. De fil en aiguille en expérimentations je me suis alors dit qu'une solution serait d'associer du fromage, du yaourt entier, des noix et du thé. Le thé, surtout à forte doses, est un psychotrope relativement puisant. Mais il est peu dangereux et parfaitement légal. Associer le thé avec le fromage et les noix a plusieurs sens :
Il est bon d'ajouter un peu de légumes ou de fruits, pour la vitamine C et quelques autres nutriments. Les légumes sont importants pour aider à éliminer les toxines. Par contre il faut proscrire toute forme d'amidon : pain, pâtes, riz, tapioca, couscous, avoine, céréales... Mangé avec de la graisse et même avec des protéines, l'amidon a des effets catastrophiques. Cela me rend malade, cela ruine l'expérience avec le thé, j'ai lu des article disant que le diabète et le maladies cardiovasculaires proviennent non du sucre ou de la graisse mais du mélange des deux... Ce problème varie suivant les personnes. Chez moi il est très marqué et je suis sûr de ne pas être le seul dans le cas. Il m'arrive de manger du pain des pâtes, du riz... mais alors je ne mange pas de gras ou de protéines avec, juste des légumes et du jus de fruit. Ce régime de gras et de thé permet donc de doser la diffusion du psychotrope dans l'organisme et le cerveau. Cela permet d'être "shooté" toute la journée mais sans effets secondaires graves. En fin de journée on peut faire un repas "normal" et plus tard aller se coucher sans difficultés. J'ai remarqué de façon assez nette qu'il n'y avait aucune tendance à devoir augmenter la dose de thé. C'est un système "autostable". Je crois que plus d'un toxicomane pourrait se trouver bien de ce régime mais c'est à vérifier. C'est une sorte de traitement palliatif intégré et constructif. Il y a une chose que beaucoup de toxicomanes recherchent et que ce régime n'offre pas d'emblée : le kick. C'est à dire une puissante et soudaine sensation de jouissance au moment où on prend sa dose de drogue. Le kick est une des choses qui s'émousse et disparaît dans les toxicomanies sévères, en même temps c'est ce que le toxicomane recherche en premier. La solution est d'apprendre à se construire son kick, par quelque méthode que ce soit : la création artistique, l'exploit sportif, les rencontres, la découverte scientifique... ce régime facilité les kicks "naturels". Donc au total le toxicomane peut s'y retrouver. Les résultats du régime ne sont pas forcément immédiatement parfaits. Au début j'essayais en prenant des doses de thé assez fortes (quatre sachets dans une tasse). En fin de journée j'étais "dans un état acceptable" mais si un ami me téléphonait pour une visite je ressentais un certain découragement et envie d'éviter l'épreuve. C'est là clairement un effet antisocial, typique des toxicomanies. On ne ressent plus le besoin des autres et on en arrive même à les considérer comme une charge. J'ai diminué la dose de thé et le problème a disparu. J'ai même constaté l'effet inverse : une fois mangé mon fromage et mon thé je devenais d'une extrême sensibilité de communication, comprenant et ressentant les points de vue et envies de mes interlocuteurs. Je me suis alors rappelé que les tibétains boivent du thé au beurre quand ils se rencontrent... Cela fonctionne aussi avec la technique. Je suis un habitué des systèmes Linux "Red Hat" ou "Fedora" et je ne supportais pas les systèmes Linux "Mandrake". Je peux vivre avec une Mandrake mais je passais d'abord deux jours à hurler des invectives et à modifier le système en profondeur. J'ai pris une grosse quantité de mélange de noix, un demi litre de yaourt entier, une tasse de thé à deux sachets et trois carottes cuites. Puis je me suis mis à installer une Linux Mandrake. Calmement et avec facilité, je me suis rendu compte qu'il y avait des solutions simples et élégantes aux deux problèmes techniques graves que présentait cette Mandrake. Il suffisait de chercher des solutions toutes faites sur Internet et de réfléchir un peu. Ensuite je me suis rendu compte que les façons de faire sous Mandrake étaient tout à fait légitimes et acceptables. Elles étaient différentes de mes Linux habituels. Mais il suffisait de penser les choses différemment, d'adopter des procédures différentes, pour au final obtenir un système tout aussi performant. Parfois même plus performant... Cette Mandrake est devenue mon système principal sur mon ordinateur. Au delà de ces aspects techniques, ce qu'il faut voir ce sont les rêves des concepteurs de ces systèmes. Les systèmes Red Hat ou Fedora que j'utilisais ont été rêvés par un groupe de personnes, avec un certain état d'esprit. Le système Mandrake a été rêvé par un groupe de personnes différent, dans un référentiel différent. J'ai réussi à passer du rêve d'un groupe de personne au rêve d'un autre groupe de personnes. On quitte la sphère de la toxicomanie pour entrer dans celle du chamanisme. (Un détail : 100 mg d'aspirine améliore les effets. Une telle petite quantité d'aspirine ne présente semble-t-il pas de danger pour une personne normale et a des effets positifs sensibles. Des quantités plus importantes n'augmentent pas les effets positifs mais présentent de sérieux inconvénients. Les cachets standards d'aspirine sont de 500 mg ce qui est beaucoup trop. Vous pouvez acheter en pharmacie des cachets de 100 mg. Ils servent à fluidifier le sang et sont prescrits par exemple aux personnes qui ont des problèmes cardiovasculaires. Un conseil : ne pas boire trop de liquide avec le repas de fromage et de noix sinon on devient écoeuré. Il faut boire pendant la journée. Mais pas trop au moment de ce repas-là.)


La drogue est du maquillage pour l'âme. Elle peut servir pour révéler des choses comme pour en cacher. Une jeune fille peut découvrir qu'elle a un visage en se mettant un peu de rimel sur les yeux. Une fois qu'elle a ressenti cela, elle peut avoir une présence en public sans être maquillée. Une personne qui se nourrit mal, qui a de grosses pustules sur la peau et un teint blème, peut mettre des couches de maquillage pour masquer cela. Elle devra mettre du maquillage tous les jours. Ce maquillage asphyxie sa peau et rend son état pire encore. Pour guérir, cette personne devra commencer par accepter sa peau. Elle devra apprendre à mieux se nourrir. Elle devra voir un médecin pour être aidée. Pour les maquillages externes comme internes, il y a des soucis de santé, des règles d'hygiène, une bienveillance sociale nécessaire, une éducation à acquérir... Devenir capable de vivre sans maquillages est un grand but dans la vie. Il y a des pièges sur ce chemin : les sectes qui vous proposent des chirurgies et des prothèses, qui veulent vous enlever des morceaux de votre corps. Les hasards de la vie qui vous blessent... On n'arrive jamais tout à fait à vivre sans maquillage. L'homo sapiens sapiens est un animal qui se maquille. Mais on peut acquérir une sincérité et une propreté dans cette démarche, arriver à quelque chose de bien.

Un ami tient un propos fort intéressant : "Le Pouvoir est la drogue la plus dure. Le problème avec la cocaïne est qu'elle te donne l'illusion d'avoir le pouvoir. Pendant une heure, deux heures... tu as l'impression d'être le maître du monde.". Le Pouvoir en tant que drogue est communément utilisé. Par exemple dans les sectes on explique aux nouveaux membres qu'ils vont devenir des leaders. J'ai assisté à un discours en première année dans une université belge où un notable expliquait à l'amphithéâtre d'étudiants qu'ils étaient là pour être des dominants. L'arnaque est qu'on ne leur apprend ensuite pas grand chose pendant leurs études. Ils ne peuvent donc pas dominer en étant des personnes instruites ou responsables. Ils peuvent seulement dominer en baissant la tête devant leurs supérieurs. S'ils baissent bien la tête, on leur donnera des places plus élevées dans la hiérarchie. C'est ainsi que leurs supérieurs procèdent pour les dominer tous. De même qu'un cocaïnomane est dominé par son dealer.


Un film qui fait la différence entre les mauvais et les bons usages des psychotropes. Essentiellement le mauvais usage de l'alcool par des individus égarés et le bon usage du peyotl sous le contrôle d'un chamane : Blueberry.



Eric Brasseur
19 septembre 1999
au 27 juillet 2005

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